Wu wei
C’est drôle comme je n’arrive pas à trouver quelque chose qui m’enthousiasme ou me passionne en ce moment. Le problème est que je ne sais pas si c’est un signe de sénilité ou de réalisation. Est-ce le désenchantement pour toutes les entreprises du samsara* ? Ou est-ce un désintérêt pour la vie, une sorte de fatigue, de lassitude, d’ennui ? Qu’est-ce qui vaut la peine de faire des efforts dans ce monde ? Atteindre l’éveil, la libération, certes ! Mais est-ce le résultat d’efforts, de faire quelque chose, ou est-ce justement la capacité de se détacher du monde des passions et des désirs ? Simplement « être », dans le wu wei*. J’ai demandé de réaliser le wu wei, et maintenant que je semble avoir perdu tout intérêt dans le faire, je me plains. Je devrais être content ! Mais le problème, c’est que ce n’est pas si facile de ne rien faire. Et même si je ne fais rien, je m’occupe : je vais et viens toute la journée quand même.
Ce n’est pas encore tout à fait le wu wei, ni l’illumination !
* Samsara (pali) : littér. transmigration perpétuelle. Désigne le cycle des renaissances – le monde conditionné dans lequel nous vivons – qui, tant que nous n’en avons pas perçu la nature illusoire et le considérons comme la seule réalité, est comparé par le Bouddha à un océan de souffrance.
* Wu wei (chinois) : littér. ne pas faire, non-action. Le wu wei est une philosophie de vie prônée par les taoïstes, qui consiste à s’abstenir de toute intention d’accomplir quoi que ce soit. Le pratiquant du wu wei se contente de suivre le flux de la vie en répondant spontanément aux besoins et aux demandes qui se présentent.
6 janvier 2001, Chiang Mai